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Expo

Martin Belou à Bernier/Eliades

Colette  Dubois

Praktische info

‘Canicula’ de Martin Belou jusqu’au 19/12 à la galerie Bernier/Eliades, 46, rue du Chatelain à 1050 Bruxelles. Ouvert ma-sa de 12-18h. www.bernier-eliades.com

Chaque exposition du jeune artiste français Martin Belou (°1986) plonge le visiteur dans un univers à la fois familier et inquiétant. Les objets ou les éléments naturels qu’on y reconnait semblent avoir été transportés vers un temps et/ou un lieu indéterminable - passé ou futur, ici ou à l’autre bout de l’univers. Les arbres ne comptent plus que quelques branches, les ramifications une seule feuille, certaines d’entre elles ont produit à leur sommet un fruit étrange minuscule ou démesuré.

Martin Belou, Floraisons-(garde fou), bois,acier, laiton, graines, pousses-pieds, cougourdes, feuille d’or. dimensions variable, 2019. Courtesy de l’artiste et Catherine Bastide

L’intervention de l’artiste prend en compte l’espace d’exposition qu’il structure et parfois meuble. Pour l’exposition Objects, love and pattern au CIAP (Hasselt), il s’agissait d’une grande table centrale, à Catherine Bastide Projects (Marseille), c’était une barre de métal qui courait le long de tous les murs, dans l’exposition Futur Ancien Fugitif au Palais de Tokyo (Paris), des bancs s’ajoutaient aux différents éléments qui prenaient place sous une tente blanche monumentale. Martin Belou conçoit chacune de ses expositions comme une partie d’un ensemble plus vaste, un paysage singulier né d’une précédente présentation et qui contient les germes de la suivante ; l’ensemble constitue le monde qu’il nous propose.

L’artiste soustrait tous ces objets au quotidien, il s’en empare et agit sur eux comme un alchimiste : des végétaux se muent en métaux, une branche d’arbre isolée devient une lance. L’association de tous ces éléments dans l’exposition engendre une vie singulière. Comme il l’explique : « Je parle beaucoup de l’idée du vivant dans mon travail que j’aime à développer d’une manière que j’appelle ‘saisonnière’ - il y a des saisons sèches, des saisons humides, des froides, des chaudes… J’essaie de toujours rendre ‘vivante’ cette idée en utilisant des dispositifs souvent sensoriels qui sont un des marqueurs de mon travail : des odeurs, de la vapeur, du brouillard, de l’eau chaude… ».

Martin Belou a étudié à l’Ecole Supérieure d’Art de Clermont Ferrand avant d’arriver à Bruxelles en 2011. L’année suivante et jusqu’à sa fermeture en 2015, il crée avec d’autres artistes, un des plus dynamiques artist-run spaces de la scène bruxelloise: De La Charge. Dans le même temps, il travaille pour plusieurs galeries et surtout pour le WIELS et La Loge. Belou considère cette période comme une manière de « refaire école » : concevoir des expositions, les mettre en place, travailler aux côtés de différents artistes sont autant d’expériences/aventures qui auront un effet déclencheur et le mèneront à entamer véritablement son travail d’artiste. Depuis, des expositions de groupe l’ont mené de Bruxelles à New York (galerie Johannes Vogt), Nice (Villa Arson) ou Paris (Palais de Tokyo). Il prépare une intervention permanente dans l’espace pour la Kunsthal de Gent, mais avant cela, il propose une exposition solo à la galerie Bernier/Eliades.

Elle s’intitule ‘Canicula’, d’après le mot latin qui donnera le mot français ‘canicule’. C’est aussi le nom donné par les Grecs anciens à Sirius, l’étoile la plus brillante de la constellation du ‘Grand Chien’, visible durant l’été sous nos latitudes. L’exposition prend la forme d’une sorte de serre dans laquelle les différents éléments sont transformés par la chaleur. Il s’agit d’une « exposition sèche, ce qui est vivant y est figé et le spectateur est amené à ressentir cette chaleur qui a pu transformer ce qui fut peut-être un paysage luxuriant » dit-il. L’exposition qui devait se dérouler au printemps dernier, a été retardée par le confinement. Ainsi, elle a évolué tout au long du printemps et de l’été. Si elle contient l’inquiétude liée à la crise climatique qui nous attend, elle affirme aussi la nécessité de repenser notre rapport au monde. Et comme Belou l’affirme : « Je pense que les artistes ont là dedans une voix qu’il devraient faire entendre, à leur manière, avec leur subjectivité, avec de la poésie ».